On peut se demander pourquoi il y a encore des goutteux et pourquoi ils font encore des crises.
Une seule réponse : ils sont mal renseignés.
Sommaire
Un mot d’histoire
La goutte n’est pas un rhumatisme, bien que les médecins les aient confondu jusqu’au siècle dernier !
La goutte est responsable de bien des douleurs articulaires.
Le mot « goutte » est né de l’idée selon laquelle la maladie provient de la pénétration goutte à goutte dans les jointures d’un poison contenu dans les humeurs.
Le coupable : l’acide urique
La goutte est due à une augmentation de la quantité d’acide urique dans le sang et d’une manière générale dans tout l’organisme.
On précise tout de suite que l’acide urique n’est pas un poison.
C’est un produit parfaitement naturel fabriqué par tout le monde.
Son taux normal est de 30 à 50 milligrammes chez la femme et de 40 à 60 milligrammes chez l’homme.
Lorsque l’acide urique circule à un taux raisonnable, cela ne comporte aucune conséquence et aucun dommage.
Au fur et à mesure de sa fabrication par l’organisme, il est éliminé par le rein et se retrouve dans les urines.
Il n’y a pas de goutte.
Les Pr Ryckewaert et Kuntz estiment qu’on ne peut parler d’hyperuricémie que lorsque le taux d’acide urique est supérieur à 70 milligrammes par litre.
Plus de 90 % des goutteux sont des hommes : la goutte est très rare chez la femme qui semble protégée par ses ovaires.
Les goutteux ont souvent des parents goutteux : leur père, un de leurs grands-pères ou de leurs oncles ont souffert du même mal.
Goutte et acide urique
3 à 4 % des gens possèdent un taux d’acide urique élevé.
Pourtant, l’hyperuricémie n’est pas la goutte.
Elle peut rester indéfiniment muette, c’est-à-dire que , bien qu’ils aient trop d’acide urique dans le sang, beaucoup n’auront jamais la goutte alors que d’autres l’auront.
Les dangers d’un excès d’acide urique
Il est difficile d’évaluer avec précision ce danger, mais il est certain qu’un excès d’acide urique favorise des lésion du rein ainsi que les maladies cardio-vasculaires.
Ce risque est plus grand s’il existe une hypertension artérielle, un cholestérol élevé, une obésité, un tabagisme, etc.
C’est ce qu’on appelle les « facteurs de risque ».
En effet, dans le sang de certains goutteux, le taux des graisses circulantes est trop élevé.
Il faut donc demander un dosage des lipides totaux, c’est-à-dire le dosage de la totalité des graisses présentes dans le sang.
Il ne faut pas se contenter de doser le cholestérol, bien connu du grand public et qui n’est qu’une fraction des graisses circulantes mais demander également le dosage des triglycérides qui sont des graisses de très petite taille.
Quand leur taux est élevé, le risque d’artériosclérose augmente.
Cela veut dire que les graisses risquent de se déposer davantage sur le paroi des artères.
Dans ce cas, le régime doit porter non seulement sur les graisses mais aussi et surtout sur les sucres, point essentiel que souvent les malades ignorent.
On peut grâce à ce régime diminuer notablement le taux de graisses dans le sang.
Si certains médicaments sont efficaces, le régime reste en fait de ce point de vue le meilleur des médicaments.
D’où vient l’acide urique ?
Il provient surtout de la viande que l’on appelle en termes savants « les protides ».
Il y a deux sortes de viandes dans l’organisme :
- d’une part, les viandes apportées de l’extérieur, soit celles de l’alimentation
- d’autre part, la viande « des muscles » qui elle aussi est transformée constamment dans l’organisme et va donner de l’acide urique
Ainsi la viande du bifteck et celle des « muscles » sont constamment cassées en éléments plus petits et parmi ces éléments, il y a l’acide urique.
Ce sont 2 affluents qui vont former ce petit fleuve d’acide urique qui circule dans le sang.
La viande n’est pas le seul aliment qui puisse fabriquer de l’acide urique, mais c’est le principal.
Le rôle des excès alimentaires
Il y a sans doute des goutteux sobres, frugaux et ils sont plus nombreux qu’on ne le croit.
Mais l’aspect classique du goutteux reste valable dans la majorité des cas : hommes mûrs, pléthoriques, aimant la bonne chère et le bon vin.
A l’opposé, beaucoup de gens enclins aux excès alimentaires ne sont pas goutteux.
Il n’y a pas de justice !
Les excès alimentaires à base de viande, surtout de viandes jeunes, font monter le taux d’acide urique dans le sang.
Un bon repas fait monter l’uricémie de 10 milligrammes par litre environ.
Pendant les périodes de restriction de la dernière guerre, certains sujets dont la goutte était bénigne, l’ont vu ainsi disparaître.
Mais dans les gouttes un peu sévères, les restrictions alimentaires ne suffisent pas, le régime ne peut à lui seul contrôler la maladie.
Il faut l’aide des médicaments.
La fréquence de la goutte au cours de l’histoire semble avoir été toujours plus grande aux époques d’abondance, dans les pays riches et dans les classes économiquement favorisées.
La liste est longue des goutteux célèbres, depuis Mazarin, Benjamin Franklin, Louis XIII, Luther… jusqu’à George V d’Angleterre.
Avec l’élévation générale du niveau de vie, la maladie s’est en quelque sorte démocratisée : la goutte est aujourd’hui banale dans toutes les classes de la société, du moins dans le monde occidental, et notamment en France car elle reste encore relativement rare dans les pays en voie de développement.
Pourquoi cet excès d’acide urique ?
2 mécanismes sont possibles.
Certains goutteux produisent trop d’acide urique.
Cette augmentation de la production est due à une sorte d’emballement de la chaîne de fabrication.
L’acide urique n’est plus seulement fabriqué à partir de la viande, des aliments et des muscles.
Il est fabriqué non seulement trop vite, mais aussi à partir de n’importe quoi.
Chez les goutteux, le rein fonctionne bien.
Il essaie d’éliminer cet excès d’acide urique mais il n’y arrive pas.
Le servie des livraisons de cette usine est débordé.
Il y a embouteillage par excès de production.
Le stock d’acide urique augmente dans l’organisme et du même coup dans le sang.
Voyons maintenant le deuxième mécanisme possible.
Dans ce cas, l’organisme fabrique une quantité normale d’acide urique.
Mais c’est le rein qui s’en élimine pas assez.
Il s’agit, là encore, d’un petit défaut héréditaire qui se trouve cette fois dans le rein.
Le rein élimine bien les autres déchets de l’organisme tels que l’urée et c’est seulement pour l’acide urique, qu’à la suite d’une fantaisie mystérieuse, il faut une grève perlée.
Le rein est paresseux et cette fois, c’est le service des livraisons qui est responsable de l’embouteillage.
Mais la conséquence est la même : le stock d’acide urique augmente dans l’organisme et dans le sang;
Pour savoir quel est le mécanisme en cause chez tel ou tel goutteux, il suffit de doser la quantité d’acide urique, que contiennent les urines : beaucoup d’acide urique signifiera que le rein l’élimine bien et qu’il n’est pas en cause : il s’agit d’un excès de fabrication.
Peu d’acide urique voudra dire que le rein l’élimine mal : il est donc responsable.
Les choses ne sont pas toujours aussi simples et les 2 défauts (fabrication excessive et défaut d’élimination) sont parfois associés chez certains goutteux.